J’ai réalisé un truc. Je ne lis plus.
Et c’est quand même assez con, parce que j’aime bien ça en fait. En tous cas avant, j’aimais bien ça. Vous allez me demander ce qui a changé depuis et à vrai dire je n’en sais strictement rien. J’ai longtemps été une lectrice assidue pourtant.
Petite, les histoires improbables de Caroline et ses amis me passionnaient. Il arrivait à ma mère de m’en offrir un album pour m’occuper lorsque j’étais malade ou me récompenser quand j’avais ramenées de bonnes notes. J’en savourais chaque ligne et chaque illustration, jusqu’à ce que les pages se détachent à force d’avoir été incessamment tournées.
Puis devenue adolescente, les fiches paroles du Star Club, quémandé avec des yeux de chat à mon grand père, entre la baguette et le journal du dimanche.
Heureusement ensuite j’ai affiné mes goûts et découvert le roman. Je me rappelle en partager certains avec ma grand-mère, pendant les vacances d’été, chacune assise en silence durant de longues heures sur les transats du jardin.
Et puis les études m’ont amenés à étudier les classiques de la littérature. J’y ai découvert Sartre, Zola, ou Proust, avec une certaine délectation, et c’est tout un univers qui s’est ouvert sous leurs mots.
Depuis que j’ai des enfants, mes lectures personnelles sont devenus plus disparates. J’ai délaissé le livre de poche pour l’école des loisirs et abandonné mes auteurs fétiches au profit des aventures de Martine. Mais je dois quand même avouer que la lecture à haute voix me procure une grande satisfaction. Je renoue avec les échappées lyriques, vestiges de ma pratiques théâtrale, et me confonds en 1000 personnages plus loufoques les uns que les autres, si on s’en tient à leurs voix empruntées.
Oui, j’aime bien ça en fait.
Et quand je vois l’intérêt hérité qu’ont mes enfants pour les mots, je me félicite tout autant de leur avoir transmis ce plaisir, que d’avoir moi-même su trouver les parades pour continuer de jouer avec. Parce que, si je ne corne plus les pages, les phrases ont pris un autre chemin et c’est dorénavant en les couchant que je prends mon plaisir.